Jean-François
Blanc
Les
AUTRES TERRES de Jean-François BLANC Lors de ma dernière visite
à l’atelier de Jean-François BLANC, situé tout en haut dans l’ancien
grenier de sa maison, le ciel était sombre et orageux au dessus
de Beaumont et mes yeux eurent beaucoup de mal à accommoder devant
les toiles qui faisaient l’objet de toute mon attention ce jour
là. Cette série, intitulée Autres Terres, de facture très personnelle,
mêlait paysages telluriques et ambiances plus aquatiques et je dois
dire qu’il m’a fallu un certain effort de concentration pour appréhender
réellement de quoi il retournait, comprendre et apprécier pleinement
ce qui se donnait à voir. Je me suis même fait la réflexion qu’arriver
à les saisir, à les considérer dans leur vérité intime nécessitait
de plonger dans la pénombre pour parvenir à apercevoir la lueur,
traverser l’orage pour avoir droit à l’éclaircie. Mais, les vrais
paysages ne sont ils pas ceux qui se méritent, qui exigent toujours
davantage du marcheur qui doit venir à eux plus qu’ils ne s’offrent
à lui d’un seul bloc et sans détour ?
Aussi, c’est très facilement que je me mets à la place de celui
où celle déambulant devant ces peintures à première vue assez austères,
toutes en retenue, peu spectaculaires ou pittoresques en tout cas,
et qui se demande s’il y a quelque chose à voir. Qu’ils soient rassurés,
la réponse est oui. Pleinement, assurément oui ! Car, passé le moment
d’hésitation, passée cette légère perte de repères entre le haut
et le bas, le ciel et la terre (ou l’élément liquide), l’œil peu
à peu s’habitue et s’autorise à pénétrer dans le réseau subtil des
nuances, dans l’architecture secrète sous- tendant le code chromatique
à dominante sombre à base de noir, de gris et de blanc de ces univers
aussi poétiques que picturaux jouant avec maîtrise sur les registres
de la représentation et de l’abstraction, du cadre et du hors cadre.
Voir,
vraiment voir, ce n’est pas simplement regarder même si notre époque
avide de spectaculaire et d’immédiateté n’admet guère qu’on prenne
le temps de méandrer, d’errer, de se perdre en chemin pour se retrouver,
s’y retrouver dans l’amoncellement de signes et d’images tape à
l’œil qui nous sollicitent… Un jour, le maître de Henri Matisse,
le très byzantin et symboliste Gustave Moreau, brillant adepte des
ors et du décorum, s’effrayant de voir son élève s’éloigner des
canons en vigueur dans son atelier, lui dit, très remonté : - Matisse,
mais que faites vous donc ? Arrêtez de supprimer, de simplifier,
il ne va plus rien rester ! Ce à quoi Matisse aurait répondu : Si
Maître, la Peinture ! C’est un peu avec cette optique là, qu’il
faut apprécier la peinture, toute d’épure, de sobriété et de distinction
de Jean-François BLANC.
Patrick MIALON, 17 Avril 2012.
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